La Golf est une indiscutable référence chez les compactes. Pourtant, c'est loin d'être ma préférée et le snobisme qui lui y était attaché naguère m'a toujours paru aussi surfait que drôle (enfin pas plus que celui attaché au premium). Elle est en tête des ventes et comme ça a été très justement souligné, c'est la voiture des gens qui ne veulent pas se tromper. Prestations vers le haut de la pile sans être toujours à la hauteur du mythe, homogénéité, valeur de revente (le fameux cercle vertueux). C'est pourtant facile de ne pas se tromper... N'était ce pas le slogan de VW il y a quelques années ?
Par contre, je suis en désaccord avec pas mal de choses dites plus haut. Dans les années 70, la Golf I a sauvé VW, ni plus ni moins mais je ne lui reconnais guère que deux atouts principaux, certes pas négligeables:
- Une résistance à la corrosion supérieure aux Fiat et Renault et une qualité de construction globalement supérieure
- Une introduction de deux motorisations inédites alors: le "gros" moteur dans une caisse légère et le diesel
Pour le reste, une R14 était au moins aussi habitable et plus confortable, une Ritmo ou une Horizon (certes plus tardives) au moins aussi modernes. Par ailleurs, il est un peu difficile de la classer car on la compare aux compactes alors qu'elle était entre les petites comme la R5 et les vraies compactes sus citées.
La Mk II a assis ses qualités en ajoutant encore quelques nouveautés du côté technique (turbo diesel, multisoupape, techniques exotiques de suralimentation, 4 roues motrices non permanentes si j'ai bonne mémoire). Le tout en inscrivant la ligne dans une habile filiation mêlant remise au goût du jour et ressemblance au modèle remplacé....une stratégie qui a depuis avoué ses limites pour ceux qui aiment un peu le style mais qui commercialement a prouvé son efficacité. Reste que cette Mk II était à l'époque un peu décriée pour son embourgeoisement et que son ambiance intérieure était à réserver aux éternels optimistes tant la vision de ce monolithe de plastique noir, envahissant, pouvait nourrir les envies suicidaires d'un conducteur à la vie sur la mauvaise pente
La Mk III, consacrée ici comme une des meilleures générations, est pour moi une des plus faibles. Finition perfectible due à l'utilisation de plastiques recyclables et probablement aussi en raison d'un début de chasse aux coûts un peu vindicatif, suspension carrément aux fraises (souvenir d'une Golf GTD Spécial (75cv mazette

) complètement désunie sur des irrégularités qu'une R19, une 309 ou une ZX absorbait sans l'ombre d'une hésitation, caricature de la ligne évoquant une MK II qui aurait voulu être plus grosse que le boeuf... Bref, pour moi, c'était loin d'être une mauvaise auto mais c'était loin d'être une référence indiscutable. Une R19, une ZX, sur des modèles comparables étaient au dessus sur bien des points à mon sens....mais voilà pour moi la vraie force de la Golf, celle résidant dans la stratégie d'innovation technique et l'existence de modèles sans concurrence. Et en l'occurence, sur cette Mk III, il y en eut deux vraiment remarquables:
- L'introduction de l'injection directe sur les diesel aboutissant à un modèle vraiment homogène, plus progressif en même temps que plus économe, 3 ans avant les autres (et encore pour Renault seulement): la TDI 90. Puis l'avènement de la TDI 110 qui inaugurait une nouvelle catégorie jusque là seulement effleurée par Citroen avec la BX puis la ZX: celle des diesels performants voire "ludiques" sur les compactes
- L'introduction d'un moteur inédit et inattendu à ce niveau de gamme: le 6 cylindres. Je le dis sans ambages, à lui seul le VR6 sauve à mes yeux cette génération, de par son intelligence; de par son bruit si particulier et de par le cocktail qu'il a permis. A savoir, l'émergence d'une compacte très performante mais capable de se fondre parmi une autre catégorie, celle des autos bourgeoises bon teint, tout aussi capable de reprendre en souplesse en 5e sur un filet de gaz en embouteillage que de hurler dans une musique autrement plus sympathique et convenable que celle de ses concurrentes, condamnées à s'égosiller avec plus ou moins de talent pour produire des performances apparaissant de ce simple fait comme "roturières" car obtenues dans l'effort. D'ailleurs, la clientèle ne s'y est pas trompée et avant d'être la malheureuse référence du caïd de banlieue et de ses aspirants (très bon titre et très bon album au passage), elle aura avant tout été celle des cadres (dynamiques bien sûrs

) cherchant un peu de compacité, de discrétion autant que de plaisir à corriger des autos au pedigree plus installé. On aura compris que je ne suis pas objectif et je garderai longtemps en tête le souvenir de mon premier essai de la bête, caractérisé par le mélange de sensations provoqué par l'incongruité d'un bruit aussi "noble" devant un tableau de bord de compacte, le délice d'un propulseur souple à l'extrême et le plaisir à l'écouter jouer une partition si bien troussée à hauts régimes et si raffinée aux allures normales. Bref, si d'aucuns, ici, l'affublent des pires tares dont un conducteur sportif puisse se plaindre (j'avais oublié que nous sommes sur le FAR et que les païlotes s'y disputent le titre de virtuose des virolos tout autant que de mari des plus belles femmes

), moi je l'adore. En ce qu'elle sait presque tout faire, sans le montrer de manière ostensible...
La MK IV a pour moi creusé l'écart à plusieurs niveaux dont un évident: la qualité de présentation, de finition, bref la qualité perçue (qui apparemment suffit à beaucoup). Là où les générations précédentes arboraient un tableau de bord envahissant caractérisé par un camaïeu de......noirs, celle ci venait avec un tableau de bord plus bas, plus clair, simple mais bien dessiné avec une légère inclinaison de la console vers le conducteur (suivez mon regard). Elle venait aussi avec le fameux éclairage bleu dont je reconnais qu'il apportait une touche de raffinement simple mais bien trouvé. La Mk IV est aussi arrivée dans la foulée de la Passat de 97 qui pour moi marque un tournant chez VW. Ces deux modèles sont probablement les premiers ayant bénéficié de la politique de réduction des coûts d'Ignacio Lopez ce qui s'est manifesté par l'avènement d'une dotation de série enfin convenable voire généreuse (ESP en série, clim aussi il me semble). Enfin, le dernier point fort de cette génération consiste à mes yeux en la diversité des propositions en matière de finitions et de motorisations...jusqu'à la caricature conduisant à de la concurrence interne. Qu'importe, elle aura permis de contenter tout le monde, y compris ceux friands de bizarreries au nombre desquels je me compte, avec des propositions comme le V5 ou VR5. Là encore, la gamme toute entière a su s'extirper de la masse au travers des modèles V6, R32 et TDI 150 qui auront tous, à leur échelle fait parler au moins autant qu'elles se sont peu vendues. Parfaite application des recettes des premium avec des locomotives auréolant l'acheteur du tout venant d'une gloire inaccessible à la plèbe cliente des autres généralistes.
La Mk V est pour moi comme la VI une évolution beaucoup plus mineure. J'accorde à ces deux avatars de la série de franches améliorations de l'amortissement (toujours moyen sur la IV bien qu'en net progrès par rapport à la III), l'apport des transmissions DSG, la R32 (ô surprise

) et....c'est à peu près tout. On note quelques errements dans le style (surtout pour la V) et un net manque d'ambition pour la VI qui s'est contentée de surfer sur la vague et le nom en assurant le minimum syndical attendu d'une Golf (et encore car la fiabilité...). D'ailleurs ces deux séries n'ont pas vécu bien longtemps.
La Mk VII a habilement affiné le style bien qu'il reste dans le très convenu. Elle a surtout repris la tradition de l'innovation technique à ce niveau technique avec des moteurs puissants, économes et des propositions inédites comme la e-Golf ou plus intéressant, la GTE. Mais tout ça ne cache plus une chose. Toutes les autos tendent vers l'asymptote de la perfection et chaque génération, les en rapprochant, contribue à resserrer les écarts jusqu'à les rendre non décisifs. Et nous en sommes là aujourd'hui.
Bref, la Golf est bien une référence sans pouvoir être érigée comme vainqueur de tous les aspects de la confrontation quand elle a lieu. Et pour revenir à l'interrogation initiale de ce topic et à la réflexion fort juste de Pàl, une des forces de la Golf me paraît avoir disparu en effet. Et cette force, c'était celle lui permettant d'appartenir au cercle restreint des autos "trans-classes" à l'instar d'une Mini ou d'une Twingo I par exemple. Des autos valorisées aussi bien par ceux désireux d'afficher leur "différence sociale" (à défaut de leur réussite) que par ceux soucieux au quotidien d'utiliser une auto bien sous tous rapports, justement peu encline à stigmatiser leur appartenance à une catégorie privilégiée. Aujourd'hui, j'en suis d'accord, les premium assument ce rôle. La Golf était un facteur de cohésion sociale, elle ne l'est plus....finalement, c'est peut être pour ça que ça va si mal

.